lundi 12 mai 2008

Mars et Vénus


Le traitement des amours de Mars et Vénus était devenu, avant même la Renaissance, emblème de la masculinité guerrière vaincue par une féminité essentiellement séductrice, compensation idéalisée du régime patriarcal.

La gravure inspirée de Carraci choisit de montrer physiquement cette victoire par la représentation de la femme dessus.

L'écho de la succube démoniaque, souvent associée au cauchemar (créature illustrée, comme l'on sait, par l'érotomane contemporain Füssli) s'ajoute à cette domination, expliquant peut-être le geste goulu de la déesse et le regard quelque peu angoissé du guerrier chevauché.

Le culte du "Nu pathétique" transforme, encore une fois, le débat en lutte gréco-romaine, faisant du lit, comme le voudront plus tard les féministes et comme l'annonçaient depuis des siècles les poètes élégiaques, un véritable champ de bataille.

Comme dans les autres images de la série nous sommes dans un décor néoclassique, ici fortement théâtralisé (outre le rideau, la cuirasse ravalée au rang d'accessoire).

L'image est malicieusement axée sur le sexe dressé, beaucoup plus prononcé que dans les images précédentes, en opposition à l'idéal classique des petits sexes, éclipsés ici par la célébration des priapes à l'antique.

C'est peut-être dans le mouvement central de ce sexe, qui pointe sa tête entre les fesses potelées comme le coussin qui assiste le couple, que se dit l'éloge baroque de la kinesis la plus totale, envahissant les recoins les plus secrets de la Création.

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